Le Pestril souffle le chaud et le froid

Salut à tous,

En spéléo, l'inconvénient de rêver et de fantasmer sur l'inconnu et les prochaines explos, c'est que la déconvenue peut être rude et qu'on peut donner l'impression d'avoir vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué. L'avantage, quand ces rêves se réalisent, c'est qu'ils en sont encore plus forts. Mais le Pestril se moque bien de ce qui se passe dans nos petites têtes et de nos petites superstitions, l'eau s'écoule dans son dédale de roche, indifférente à la venue ou non des spéléos.

Guillaume a déjà posté un message sur le blog de son club (exploscm.canablog.com), où il a déjà tout dit : comment nous avons pu passer sans se transformer à nouveau en terrassiers, comment juste derrière une belle galerie nous attendait, à quel point nous y avons cru, que la déconvenue fut à la hauteur de notre espoir, mais qu'au final on termine heureux de cette explo, ce n'est pas tous les jours que l'on peut ouvrir et plonger une résurgence majeure !

Nous voici donc ce samedi Annick, Marie-Laure, Stoche, Guillaume et moi à nouveau devant le Pestril. Nous avons trépigné toute la semaine, nourrissant les espoirs les plus fous sur cette suite entrevue entre les blocs. Il s'agit tout de même d'une des résurgence majeure du département, l'exutoire du réseau de Cabrespine ! 3 ou 4 km nous séparent du fond de ce trou, et d'après les colorations, le transit est très rapide et laisse penser que la rivière passe en bonne partie en écoulement libre. Et quand on connait la taille des galeries de Cabrespine...

En face de la résurgence, les chateaux de Lastours

La résurgence vue de l'autre rive de l'Orbiel. On voit bien la quantité de blocs que nous avons déplacés la semaine précédente...

On commence par observer posément le passage, faisons tomber encore un bloc ou deux, puis décidons qu'il est sûr et franchissable avec des bouteilles de 4 litres. Guillaume se lance. Il racle, se contorsionne et gagne quelques centimètres à chaque fois. Enfin, il disparait, puis je le vois s'agiter fébrilement. Ne tenant plus, je le rejoins. On se retrouve dans un vaste volume, la suite est au fond. Guillaume se laisse descendre pour se retrouver à -13 devant une magnifique galerie. On y est ! Nos rêves vont se réaliser, il ne nous reste plus qu'à filer sur des kilomètres pour rejoindre cabrespine !

à côté de Guillaume, le passage que nous avons ouvert

nous venons d'entrevoir la suite prometteuse...

En attendant, on fait demi-tour, car on est partis sans palmes. Guillaume a d'ailleurs oublié les siennes, en faux ami, j'en profite pour passer devant. Je rattrape le dévidoir, et avance vers l'inconnu...

 

Au début, c'est gros, et on y croit

Un virage à droite, un autre à gauche...

 Mais une de mes lampes chinoises s'éteint. J'avance encore un peu, je suis à -25, et la deuxième fait de même. Saletés de lampes ! Dans le noir complet, je dois déposer le dévidoir et faire demi-tour. Je croise Guillaume qui, sans palmes, avance comme une écrevisse au fond de l'eau. Il me passe une lampe et m'accompagne à la sortie. Je n'ai plus qu'à lui passer mes palmes, à lui de pousser l'explo. On l'attend tout en planifiant déjà les prochaines sorties, car c'est sûr, ça va continuer ! De l'autre côté du miroir, Guillaume voit les choses différement. Il a repris le dévidoir et arrive bien vite à la lèvre d'un puits. Celui-ci le mène à -40, où tout le courant provient d'une étroite diaclase. Le passage est pénétrable, mais délicat à négocier. Nous ne sommes qu'à 51 m de l'entrée. Avec ses 4 litres, Guillaume est contraint de renoncer pour le moment. 

Puis, à -25, un puits qui nous mène à -40 sur une étroite diaclase, juste sous Guillaume.

Son récit, à son retour, nous fait l'effet d'une douche froide. Nos espoirs avaient gonflé comme une baudruche, et d'un coup elle éclate. Si l'exploration n'est pas terminée, l'addition de la profondeur et de l'étroitesse nous enlève tout espoir d'avancer significativement vers Cabrespine.

L'après-midi, je repars avec 2x7 litres pour voir comment se poursuit la diaclase derrière l'étroiture. celle-ci est franchie sans trop de difficultés, mais derrière, ça reste étroit. Je ne rajoute que 5 mètres au total, car il faut avancer doucement dans les étroitures à ces profondeurs. On vérifie qu'on n'a pas laissé un beau départ quelque part, mais tout le courant provient bien du fond.

Le lendemain, on décide de poursuivre encore un peu. Guillaume réalise une belle vidéo, j'espère qu'il pourra la poster prochainement. Au terminus, tandis que Guillaume s'attelle à la topo qu'il fera jusqu'à l'entrée, je pousse encore un peu dans la diaclase. La veille, le conduit me semblait remonter, mais il n'en est rien, on reste dans la zone des -40. Un virage à gauche bien marqué, et ça continue toujours étroit. Je rajoute 20 m au total, et fait demi-tour à -43, au-dessus d'un puits de 4 à 5 m. 77 m de fil auront été tirés depuis l'entrée. La suite est encore plus profond...

Après un pique-nique, on s'immergera à nouveau pour faire quelques images, mais l'eau est restée laiteuse et le résultat n'est pas terrible.

Au final, après des hauts et des bas, nous sommes contents de cette explo. Sur un trou qui fait causer les spéléos depuis des décennies, rien n'était connu et en un we nous en ramenons un bout d'explo, la topo, des photos, des vidéos. Si nous savons qu'on ne pourra pas aller très loin, la suite est possible. Le passage est étroit mais pas désagréable, et on peut l'améliorer un peu en cassant des lames de chaille. On devrait ainsi pouvoir prendre des bouteilles un peu plus grosses... et vous en dire plus la prochaine fois !

Comments

[Nadine]

On s'y croirait vraiment, et j'attends la suite .....

[gounel]

Je vibre par procuration à la lecture de ton récit. Vous êtes peut-être très proches d'un mega exploit et d'une méga explo. Retomber dans Cabrespine post-terminus, et si diffluence, peut-être un autre collecteur. Énorme !!!

[Franck]

Salut, Guillaume a posté une vidéo de la progression depuis l'entrée jusqu'à l'étroiture à -40, vous pourrez voir ça sur le blog de son club exploscm.canalblog.com